Cardinal Martini : A propos de la légalisation de l'avortement (2)
22 avril 2006
Sans revenir sur la totalité de sa déclaration, notons que le Cardinal Martini lève un problème sous-jacent complexe : l'Etat devait-il (pouvait-il) légaliser sur l'avortement pour limiter les dégâts des avortements clandestins? Nombreux sont ceux qui se posent la question voire justifient la légalisation de l'avortement par ce biais.
La sacrée congrégation pour la doctrine de la foi a édité en 1974 un document "l'avortement provoqué" qui donne réponse à ce problème : Aucun Etat n'a le droit de légaliser l'avortement, quelle que soit la raison invoquée.
En résumé :
1 - Certes, un Etat n'est tenu de punir toute faute morale. Mais renoncer à condamner l'avortement revient à le légitimer et le légaliser peut laisser croire que celui-ci n'est pas un crime, vu que les autres crimes de même gravité restent condamnés (paragraphe 20).
2 - La loi doit aider à mieux faire. Elle ne peut donc aller à l'encontre des lois de Dieu et ne peut déclarer innocent de qui serait contraire au droit naturel. Cette dernière opposition suffit à faire qu'une loi ne soit pas une loi (paragraphe 21).
3 - Aucun catholique n'a le droit d'apporter un quelconque soutien à une loi autorisant l'avortement (paragraphe 22).
Le texte intégral de cette déclaration ratifiée par Paul VI est en ligne et garde toute son actualité et sa valeur.
Dans son interview, le cardinal déclare demander le respect des personnes qui suivent leurs consciences en pratiquant un avortement "dans ces cas extrêmes" (cas où la mère ne pense pas pouvoir s'occuper de l'enfant). Ce qui est légitime, mais peut prêter à confusion. Respecter la personne, n'est pas approuver des erreurs, le cardinal n’approuve pas.
Plus grave sans doute, c'est lorsqu'il déclare que lorsque la vie de la mère est en danger, l'avortement est licite, même si l'héroïsme est plus louable. Il me semble pouvant porter à de nombreuses équivoques, de procéder ainsi par généralités, alors que ces questions sont très subtiles et du ressort de discussions savantes de morale médicale.
En ce qui concerne le préservatif, il déclare que "dans certains cas" celui-ci peut constituer un "moindre mal". C'est-à-dire un mal. Il ne l’approuve donc pas. Il aurait pu dire toutefois qu’aus dires de certains, le préservatif ne préserve pas du SIDA, puisque c’est de cela qu’il s’agit. Il ne le dit pas, dommage.
Le cardinal Martini ne dit pas que la loi autorisant l’avortement est bonne, il dit que dans la mesure où elle a pu empêcher les risques des avortements clandestins, elle a eu un effet bon. C’est subtil, c’est jésuite. Donc en principe, il ne conteste pas que l’Etat doive réprimer l’avortement, mais il trouve un effet bon, non par essence, mais par effet collatéral en quelque sorte, à la loi.
Bon, le Cardinal est bien un jésuite. Ultra laxiste en matière de morale, très subtil, voulant manifester de la compréhension envers tous, il est « positif » et charitable au-delà du raisonnable, mais son interview ne peut laisser aucun doute sur son attachement à la lutte contre l'avortement, pour la vie et même défavorable à la contraception.
Un dernier mot sur l’article du journal « La Croix », reprenant une dépêche de l’AFP, rendant compte de l’interview, il y est dit
« Le cardinal Martini estime que le rôle de l'Eglise est de "former les consciences", d'aider à "discerner le bien du mal en toutes occasions", mais que "les interdits et les +non+ ne servent à rien". »
Or si le premier membre de phrase est exact, le second pèche par omission le Cardinal a dit « à mon avis les interdits et les « non », ne serviront à rien, surtout s’ils sont prématurés, même s’il faudra parfois savoir les énoncer. »
En version originale :
« A mio avviso non serviranno tanto i divieti e i no, soprattutto se prematuri, anche se bisognerà qualche volta saperli dire. »
Les médias ont rendu compte très tendancieusement, voire fallacieusement, de ses opinions. Car ce dernier membre de phrase ne signifie nullement qu’il est favorable à la loi autorisant (ou pire organisant subventionnant) l’avortement, mais qu’il était nécessaire de préparer les consciences. Ce qui est une donnée du bon sens. Cette idée est parfaitement juste.
Merci au Salon Beige de nous avoir permis de (re)lire le texte de Paul VI et de Jean-Paul II. Ces textes sont véritablement fondamentaux.
Rédigé par : Denis Merlin | 22 avril 2006 à 06:42
Memento.SS Paul VI Le Grand , le très courageux auteur d'Humanae Vitae,encyclique de 1968,qui fit l'effet d'un coup de glaive lumineux dans le monde des Martini and Co,Princes de l'ambigu.
"Que votre oui soit OUI et Votre non soit NON."C'est tout l'Evangile.C'est crucifiant parfois le principe d'identité ..A RELIRE.
Rédigé par : | 22 avril 2006 à 07:44
Deux commentaires censurés :
1 - Ce n'est pas Paul VI qui a promulgué Evangelium Vitae.
2 - Ce n'est pas le lieu pour faire le procès d'un pape et nul n'en a les compétences.
3 - Vos propos sont hors sujet par rapport à l'objet du post.
Lahire
Rédigé par : Eloi | 22 avril 2006 à 10:23
Toutes mes excuses pour ces deux posts effectivement déplacés...et inexacts !
Rédigé par : Eloi | 22 avril 2006 à 11:55
Merci Lahire pour la citation de ces passages de la Déclaration Questio de Abortu, de Paul VI sur l'avortement provoqué (1974). Je retiens paragraphe 21 : "la loi n’est pas obligée de tout sanctionner mais elle ne peut aller contre une loi plus profonde et plus auguste que toute loi humaine, la loi naturelle inscrite dans l’homme par le Créateur […] La loi humaine peut renoncer à punir, mais elle ne peut déclarer innocent ce qui serait contraire au droit naturel, car cette opposition suffit à faire qu’une loi ne soit pas une loi."
Et j'extrapole pour poser cette question – si vous me permettez cette digression - : une constitution politique, sorte de loi suprême au-dessus des lois... (protégée chez nous par le Conseil constitutionnel dit Conseil "des sages"...), une constitution donc comme celle de la Ve république, qui 1- proclame la souveraineté du peuple, en opposition diamétrale à la notion chrétienne du pouvoir (tout pouvoir vient de Dieu et doit pour être légitime, être exercé conformément à ses lois révélées...), 2- une constitution qui va à l'encontre de la loi morale, aboutit nécessairement à l'élimination de Dieu qui est chassé de la Cité par la révolte de l'homme, inspiré de l'esprit infernal, 3 - une constitution qui sape radicalement le dogme de la Chute originelle et prétend lui substituer un dogme tout contraire (la démocratie...), une telle constitution est-elle une constitution légitime ? Contraint-elle légitimement au for interne ? N'est-elle pas plutôt une tyrannie dans tous les sens du terme ?
Ce sujet de la Consitution politique, loi suprême au-dessus des lois, est d'une importance primordiale à l'heure où tout craque... dans notre pauvre Pays, et à l'heure où nous en sommes - encore - à DISCUTER (pendant que des millions d'âmes se perdent) de la légitimité ou pas de lois (celle du droit à l'avortement) qui sont quand même en-dessous de la loi suprême en France qui est la Constitution de la Ve république... Une telle loi (droit à l'avortement) en pratique n'a pu passer que par accord - au moins tacite - du Conseil constitutionnel, l'a jugeant conforme à la Constitution de la Ve république... Ou bien elle ne serait jamais passée.
Il me semble donc primordial - avant de discuter de détails... - de commencer par nous attaquer aux causes de telles lois immorales et la cause première n'en est-elle pas cette Constitution athée et satanique qui nous asservit sous son joug depuis maintenant trop longtemps ?
J'espère que le Salon Beige comprendra toute l'importance d'un tel débat. Il en prend le chemin avec ces passages sur la loi morale au-dessus de la loi civile s'agissant de l'avortement, ce qu'un Chirac refuse en disant : "Non à une loi morale qui primerait la loi civile" (Chirac : "Le Journal du Dimanche", 2 avril 1995).
Cordialement,
Rédigé par : Ingomer | 22 avril 2006 à 13:01
@ Ingomer :
Vos propos se tiennent. Mais il y a des tas de toutes petites choses à entreprendre et des toutes petites victoires à gagner! Viser un but lointain comme vous le faites n'empêche pas d'obtenir des petits succès ponctuels. Mener un petit combat ponctuel n'est pas en contradiction avec un objectif final plus large.
J'irai même plus loin :
- on atteint le but de sa route avec la grâce de Dieu par une multitude de petits pas humains bien orientés et non par un seul pas de géant.
- Pour une victoire totale qui n'appartient qu'à Dieu, il faut une multitude de petits combats intermédiaires menés par nous :
"Dieu ne nous a pas demandé de vaincre, mais de combattre" Monseigneur Freppel.
Et bien sûr : "en nom Dieu, les hommes d'arme batailleront et Dieu donnera la victoire" Sainte Jeanne d'Arc.
Rédigé par : Lahire | 22 avril 2006 à 13:12
Qui c'est ce Eloi qui signe "Lahire"? (cf commentaire + haut)
Rédigé par : Martes in Deo | 22 avril 2006 à 13:24
"@ Ingomer :
Vos propos se tiennent. Mais il y a des tas de toutes petites choses à entreprendre et des toutes petites victoires à gagner! Viser un but lointain comme vous le faites n'empêche pas d'obtenir des petits succès ponctuels. Mener un petit combat ponctuel n'est pas en contradiction avec un objectif final plus large.
J'irai même plus loin :
- on atteint le but de sa route avec la grâce de Dieu par une multitude de petits pas humains bien orientés et non par un seul pas de géant.
- Pour une victoire totale qui n'appartient qu'à Dieu, il faut une multitude de petits combats intermédiaires menés par nous :
"Dieu ne nous a pas demandé de vaincre, mais de combattre" Monseigneur Freppel.
Et bien sûr : "en nom Dieu, les hommes d'arme batailleront et Dieu donnera la victoire" Sainte Jeanne d'Arc."
Entièrement d'accord.
J'apprécie la citation de l'excellent Mgr Freppel.
L'objet de ma réflexion consistait à se demander si nous ne pouvions pas, sur le Salon Beige, parallèlement, entamer un débat sur la souveraineté, le pouvoir, la source du droit, etc. L'emprise de Satan sur la cité - et donc sur les âmes -, se fait par le truchement des institutions politiques dites "modernes" qui flattent l'orgueil de l'homme, trompent son intelligence et aliènent ses droits naturels.
Rédigé par : Ingomer | 22 avril 2006 à 13:43
Pour en revenir au sujet de ce post :
Le Cardinal Martini.
Deux constatations : Une partie du courant "moderniste" au sein de l'Eglise n'a tjrs pas digéré l'élection de notre Saint-Père Benoit XVI;
- 2°, les journalistes sont trop contents de trouver et manipuler un Cardinal réputé "progressiste" en lui faisant dire certaines choses et en dirigeant ses propos contre le magistère de l'Eglise Catholique. La subversion au coeur des institutions.
La Bête ne sait plus quoi inventer...
Rédigé par : | 22 avril 2006 à 15:19
A Martes in Deo : ce n'est pas Eloi qui signe Lahire, c'est Lahire qui a censuré Eloi !
Pas de panique, il n'y a pas de faussaires au Salon Beige !
Rédigé par : Eloi | 22 avril 2006 à 18:43
Tout d'abord, je vous encourage vivement à lire ou à relire l'encyclique Veritatis Splendor de JPII. Elle est certes difficile mais le raisonnement en est le suivant : un acte est toujours objectivement bon ou mauvais, selon qu'il sert ou non le bien de l'homme (et donc le Bien commun, mais aussi le Bien de Dieu, car l'Homme est indissociablement uni à Dieu, qu'il le veuille ou non).
Le Bien le Vrai et le Juste ne dépendent pas de nous (ils ne sont pas "culturels"), ils nous sont indiqués par Dieu (cf l'Arbre du Jardin en Gn 2-3)tout au long de l'histoire de l'Alliance jusqu'à nous aujourd"hui, par l'intermédiaire de la Bible, de la vie du peuple des croyants et du magistère.
---Si nos interlocuteurs ne peuvent entendre "Dieu" disons "nous viennent de bien plus haut que nous"----.
C'est ce qui fait notre humanité, à la différence des animaux.
Un acte mauvais donc ne peut être modifié en Bien en fonction des conséquences ou des circonstances. C'est cela qui est CAPITAL
Mais l'inverse est vrai, hélas...Le Bien est toujours plus fragile que le Mal.
Une fin, un but ne jsutifie en aucun cas toute sorte de moyens quelqu'ils soient: les moyens doivent être accordés au but. La cohérence est essentielle pour vivre dans la vérité.
Je m'explique : si l'acte posé est Bon et que les moyens sont bons il sera... bon. Tournez l'équation dans les trois autres sens, vous verrez que le Mal est majoritaire...
L'avortement (comme toute atteinte à la vie humaine) est un crime, une privation volontaire de la vie qui est aux yeux de Dieu ce qui est de plus sacré, puisque c'est SA vie, c'est Lui le Donateur.
En conséqence une personne qui avorte ou fait avorter ou vote pour l'avortement commet un acte mauvais, qu'il faudra assumer comme tel, et dépasser bien sûr avec toutes les richesses de la charité et de la miséricorde.
Donc ce qui est urgent c'est d'éduquer les CONSCIENCES, il faut dire ce qu'est le Bien et le Mal, clairement, pédagogiquement,en ouvrant toujours le chemin de la rédemption.
Car sans Vérité il n'y pas de Justice, sans justice pas de Paix. Surtout dans les coeurs silencieusement broyés des mamans.
Secondement: dans la gamme des actes objectivement mauvais, il y a en effet une sorte de "gradation" (attention, notion à manier avec beaucoup de subtilité). Un acte homosexuel est par exemple moins "grave" mais pas moins mauvais, qu'un meurtre, il touche deux personnes majeures et consentantes; le meurtre, lui, prive injustement de sa vie un être humain. Bien plus grave encore est l'avortement qui tue un enfant en devenir, une promesse de vie.
Attention donc à ne pas parler de "moindre mal" ce qui déculpabilise largement le commetteur mais d'actes graves ou gravissimes, (ou une autre expréssion ... je n'en trouve pas à la minute, cela vaudrait la peine de faire des propositions)
Je vous renvoie ici au Cathéchisme de l'Eglise Catholique dans toute la partie éthique/morale (cela signifie strictement la même chose) intitulée les 10 commandement à partir du n°2258. Vous noterez la différence de ton et d'engagement des différents paragraphes.
Bonne lecture!
Rédigé par : claire | 22 avril 2006 à 19:27
@ Lahire qui a écrit sur le commentaire d'Eloi:
Merci de votre éclaircissement, je n'avais pas tout compris au premier abord.
Il est effectivement normal que vous puissiez réécrire les commentaires injurieux ou de teneur jugée inopportune.
Merci pour votre travail de qualité et bonne continuation.
@+
Rédigé par : Martes in Deo | 22 avril 2006 à 21:08