Juppé et Le Pen d'accord pour soumettre les religions à l'Etat (2/2)
17 février 2011
Les politiques cités ci-dessus ont malheureusement raison de parler de "soumission" des religions à l'Etat. Mais elle est en soi scandaleuse : la plupart de nos clercs et des croyants sont désormais soumis à des lois qui, s'ingérant dans le modus vivendi ou le practis des religions avaient pourtant fait sortir des prélats et des catholiques dans la rue. Un catholique doit-il accepter que la pratique d'un pélerinage soit concédée par l'Etat alors qu'elle pourrait être imposée pour le bien des âmes? Doit-il attendre l'autorisation d'une préfecture pour marcher en priant?
En effet, la question première n'est pas de savoir si la prière publique relève de l'ordre public ou de la laïcité, si le financement des lieux de culte doit reposer sur l'égalité entre les religions ou sur les réalités historiques, etc. A la limite, ces débats n'offrent aucun intérêt, puisqu'ils releveraient de décisions politiques. La question de fond, la première question à laquelle il faut répondre avant tout autre d'ordre légaliste ou financier est la suivante : est-ce du ressort de l'Etat d'intervenir dans la pratique et la place des religions dans l'espace public? La réponse existe :
" Les justes limites à l'exercice de la liberté religieuse doivent être déterminées pour chaque situation sociale avec la prudence politique, selon les exigences du bien commun, et ratifiées par l'autorité civile à travers des normes juridiques conformes à l'ordre moral objectif. Ces normes « sont requises par l'efficace sauvegarde des droits de tous les citoyens et l'harmonisation pacifique de ces droits, et par un souci adéquat de cette authentique paix publique qui consiste dans une vie vécue en commun sur la base d'une vraie justice, ainsi que par la protection due à la moralité publique (...)
En raison de ses liens historiques et culturels avec une nation, une communauté religieuse peut recevoir une reconnaissance spéciale de la part de l'État : cette reconnaissance ne doit en aucune façon engendrer une discrimination d'ordre civil ou social pour d'autres groupes religieux (...)
Afin de prévenir ou d'apaiser d'éventuels conflits entre l'Église et la communauté politique, l'expérience juridique de l'Église et de l'État a diversement défini des formes stables de rapports et des instruments aptes à garantir des relations harmonieuses. Cette expérience est un point de référence essentiel pour tous les cas où l'État a la prétention d'envahir le champ d'action de l'Église, en entravant sa libre activité jusqu'à la persécuter ouvertement ou, vice-versa, dans les cas où des organisations ecclésiales n'agissent pas correctement vis-à-vis de l'État" (Compendium de l'Eglise catholique; chap. VI).
Application ("expérience") en France par Louis XV, Roi très chrétien, signataire d'un traité qui stipulait que :
"les consuls français auraient le droit d'avoir dans leur maison un endroit réservé à leurs prières et à leurs lectures religieuses ; que ceux qui voudraient, parmi les chrétiens, quels qu'ils soient, se rendre à la maison du consul pour les lectures et les prières n'en seraient empêchés par personne et que, de même les sujets de notre Seigneur - que Dieu le protège -, s'ils étaient établis dans le pays de France, dans quelque ville que ce soit, nul ne pourrait les empêcher d'établir une mosquée pour leurs prières et leurs lectures religieuses".
A l'époque, les rogations se déroulaient sans problème ni autorisation légale : c'est sans doute cela la vraie liberté religieuse. Et ce que l'on vit aujourd'hui s'appelle du laïcisme qu'il soit proposé par les responsables politiques cités en tête de ce post ou par les clers qui ont capitulé devant la relégation de la religion aux ordres du politique.
Que César s'occupe de César et que ceux qui ont en charge le culte à rendre à Dieu, ait le courage de monseigneur Centène et de trop peu de laïcs : de descendre dans la rue et d'y rester!
On voit l'Islam comme une 'Eglise musulmane'. Mais est-il dit dans l'Islam-religion que les prières doivent être communautaires (nécessité mosquée)? Je ne crois pas !
Pourquoi transpose-t-on la pratique Chrétienne ? Ce n'est pas parce que les Chrétiens ont besoin d'un lieu de culte que le lieu de culte est aussi indispensable aux musulmans. cf J Fadelle !
La mosquée est une arme de l'Islam-politique ! A tout le moins, en France, on ne devrait n'y PRECHER qu'en français
[Vous êtes là dans un dialogue entre religieux duquel est exclu de facto l'Etat en tant que tel. La différence de niveaux de discussion est difficile à cerner et pourtant bien réel. Ne demandons pas au politique de gerer une religion, sinon il les gérera tous. A nous de convertir. Lahire]
Rédigé par : Grégoire | 18 février 2011 à 00:24
Précisons quand même que ce qu'énonce ici le Compendium, c'est l'enseignement de Vatican II (il reprend presque pour mot la déclaration "Dignitatis humanae" sur la liberté religieuse).
Or, parmi ceux qui acceptent cet enseignement (non infaillible) comme parmi ceux qui le contestent (Fraternité saint Pie X, etc.) beaucoup admettent qu'il représente un changement :
— par rapport à la doctrine antérieure de l'Église,
— et au moins, en tout cas, par rapport à sa pratique.
Beaucoup de papes, de saints docteurs et de saints rois avaient toujours considéré jusque là qu'une religion fausse n'avait aucun droit strict à être exercée publiquement dans un pays chrétien, et que le chef de l'État devait même plutôt, si c'était facilement possible, interdire ce culte public, et ne le tolérer que pour éviter un plus grand mal.
Il suffit de consulter les manuels d'avant Vatican II pour voir que tel était jusque là l'enseignement commun.
(Le concordat que Pie XII signa avec l'Espagne catholique de Franco précisait encore que le seul culte PUBLIC autorisé en Espagne était le culte catholique. Il fallut le modifier après Vatican II, pour tenir compte de Vatican II).
[Quid du traité de Louis XV alors? Lahire]
Rédigé par : Précy | 18 février 2011 à 07:02
« Ne demandons pas au politique de gérer une religion, sinon il les gérera toutes.»
Attention, cher Lahire :
— au niveau de la prudence, et vu les circonstances actuelles, vous avez peut-être raison,
— mais au point de vue de la doctrine, il est normal que l'autorité politique règlemente et contrôle ce qui se passe dans la vie PUBLIQUE (c'est précisément son rôle).
[Gérer, administrer, s'introduire dedans, imposer un fonctionement et autoriser ou refuser des cultes publics... Primo : au nom de quoi?, c'était l'objet d'un premier post de ma part; Secundo et surtout ici : le rôle de l'Etat n'est pas de CONTRÔLER les religions, mais bien de permettre qu'elles soient pratiquées et qu'elles se déroulent selon leurs propres règles et normes parce que justement elles ne dépendent pas de l'Etat.
D'accord sur la suite très instructive et bien argumentée, sauf sur le passage bien construit néanmoins sur Vatican II, simplement parce qu'il ne fait pas avancer les affaires. A moins de proposer une solution.
Lahire]
Seulement, il faut bien voir qu'il existe, selon la doctrine catholique, DEUX sociétés dites "parfaites" (c'est-à-dire autonomes – tandis que la famille, par exemple, bien que cellule de base de la société, est une société dite "imparfaite". Ces deux sociétés dites "parfaites" sont : la société politique, d'une part (ordre naturel), l'Église catholique d'autre part (ordre surnaturel).
Chacune de ces deux sociétés est autonome en son ordre (ce qui ne veut pas dire qu'elle a le droit de faire n'importe quoi : la société politique reste soumise à la loi naturelle, et l'Église à une constitution divine très précise).
En soi, il est normal, encore une fois, que l'autorité politique règlement ce qui se passe dans le domaine public. Si donc il n'y avait pas de religion SURnaturelle (avec une autorité religieuse directement désignée par Dieu), il serait normal que l'autorité politique règlement le culte public.
Mais comme, de fait, Dieu a institué une religion surnaturelle, il existe, dans le domaine religieux, une autorité religieuse indépendante de l'État.
Cela dit, la doctrine catholique est très claire : il n'existe que DEUX sociétés "parfaites" : la société politique (ordre naturel) et l'Église (société surnaturelle). Les fausses religions ne sont pas d'origine surnaturelle et n'ont donc pas d'autorité supérieure à l'État. L'État a donc le droit (et même le devoir) de contrôler et règlementer leur culte public (sans néanmoins vouloir régir les consciences : ce n'est pas son rôle).
Encore une fois, tel est l'enseignement traditionnel de l'Église, qu'on peut trouver par exemple dans le Traité de Droit public de l'Église du cardinal Ottaviani (qui n'est tout de même pas n'importe qui – et qui ne fait que synthétiser, références à l'appui, une doctrine qui ne vient pas de lui). Évidemment, le point délicat était toujours celui des matières dites "mixtes", c'est-à-dire relevant à la fois du pouvoir civil et de l'autorité ecclésiastique.
Aujourd'hui, cet enseignement est doublement contesté :
— par l'islam, bien sûr, qui ne distingue pas les deux pouvoir, et ne reconnaît donc qu'une seule "société parfaite" : lui-même !
— mais aussi, dès le 19e siècle par la perspective naturaliste (i.e. refusant l'existence d'un ordre surnaturel) ; dans ces conditions, évidemment, l'État ne peut reconnaître l'autorité surnaturelle de l'Église, et tend nécessairement à l'asservir.
En face, deux stratégies : le magistère (Pie IX, Léon XIII, saint Pie X, etc.) condamne le naturalisme et réaffirme l'autorité surnaturelle de l'Église, qui peut donc, en son domaine, s'imposer même à l'autorité politique suprême. Mais à côté, une autre stratégie tente une sorte d'argument ad hominem : c'est l'école libérale-catholique (plus ou moins rejointe par Vatican II), qui cherche un moyen de défendre l'Église SANS avoir besoin d'invoquer son autorité surnaturelle (afin de ne pas heurter de front le naturalisme). D'une certaine façon, l'école catholique-libérale entre dans la façon dont l'ennemi posait le problème, afin de pouvoir lui répondre sur son propre terrain. Mais comment faire ? Elle insiste, pour cela, sur les droits de la conscience religieuse par rapport à l'État (ce qui est une donnée traditionnelle), et essaie d'étendre ces droits à l'ordre public (en arguant que ce serait amputer le sentiment religieux que de ne pas lui permettre de s'exprimer publiquement – c'est la nouveauté de Vatican II).
Seulement, coup de théâtre, voici maintenant qu'intervient l'islam, qui pose la question d'une toute autre manière que les naturalistes du 19e et 20e siècle,…
Le débat est donc loin d'être clos…
Rédigé par : Précy | 18 février 2011 à 07:52
César a le devoir de reconnaître et de protéger la seule vraie religion [Source doctrinale? Lahire] et non de l'asservir comme tentèrent ou le firent Philippe le Bel, Henry VIII, Louis XIV, Napoléon..........
César est aussi une créature de Dieu, il lui doit sa soumission, mais depuis un certain temps il a adopté la doctrine du Non Serviam du Dieu de ce monde. Les fausses religions qui ne peuvent être éradiquées sans troubles graves doivent quant à elles ne pas être favorisées ni aidées de quelque manière que ce soit.
[Certes. Lahire]
Rédigé par : LB | 18 février 2011 à 08:02
"en raison de ses liens historiques et culturels avec une nation, une communauté religieuse peut recevoir une reconnaissance spéciale de la part de l'État : cette reconnaissance ne doit en aucune façon engendrer une discrimination d'ordre civil ou social pour d'autres groupes religieux (...)"
difficile d'adhérer à ce texte et de s'insurger ensuite contre la construction de mosquées etc... L'islam se développe chez nous: il faut donc lui faire toute sa place (ce que font d'ailleurs beaucoup de nos prélats) si l'on veut être logique...
Arguer des liens historiques et culturels est un piège: d'abord parce que ces liens évoluent et ensuite c'est s'interdire de vouloir convertir dans des aires géographiques culturelles distinctes sous prétexte de respect des autres cultures (sauf à vouloir que cette conversion reste secrète et privée)
"Dieu se rit de ceux qui se lamentent sur les effets dont ils chérissent les causes" disait Bossuet. Ca n'a jamais été autant d'actualité
Rédigé par : FR | 18 février 2011 à 08:12
Quid du traité de Louis XV ?
Je n'en sais rien précisément (une référence m'intéresserait), mais apparemment il s'agit d'un accord de réciprocité avec un prince musulman : Louis XV a obtenu le libre exercice du culte pour tous les chrétiens de l'endroit (qui peuvent y assister chez le consul), et il accorde, en contrepartie, la liberté du culte aux sujets dudit Prince (et non aux musulmans en général) qui séjourneraient en France.
Autrement dit, il ne s'agit pas de l'énoncé d'un principe général et absolu selon lequel l'établissement des mosquée en France ne regarderait aucunement le pouvoir politique, mais d'un accord concret avec un prince précis, dans des circonstances particulières (qui rendaient sans doute cet accord avantageux pour les chrétiens). On est dans la doctrine traditionnelle.
[Oui et ce traité pratique signé d'un roi très chrétien est en parfaite conformité avec ce qui fut écrit par l'Eglise quelques siècles plus tard, en 1962 diront certains. Intéressant surtout pour ceux qui avaient des inquiétudes sur le maintien de la tradition dans l'Eglise. Lahire]
Rédigé par : Précy | 18 février 2011 à 08:21
[...]
Rédigé par : LB | 18 février 2011 à 08:41
Pour répondre a Lahire de façon plus prosaïque,je pose une simple question: combien y avait-il de musulmans en France sous Louis XV et en 1926, date de construction de la mosquée a Paris? Leur nombre a explose aujourd'hui et c'est cela qui rend la situation ingérable!!! A moins de les convertir ...
[Certes, mais c'est nous - la France héritée de Louis XV et des poilus - qui avons accueilli 95% de ces musulmans que nous estimons à juste titre en surnombre. Et effectivement, nous avons peut-être passé insidieusement un point de non-retour pour la paix sociale. Mais les faits doivent-ils bafouer les principes, surtout ceux de la DSE? Non. La solution du problème de l'islam doit être conforme à la vérité de la DSE et à la vision de l'homme de l'Eglise sous peine de ne pas résoudre le problème, voire de l'empirer. C'est ce que j'essaie de faire comprendre.
Interdire la prière dans la rue aux musulmans quelque soit le prétexte ne changera rien. Laisser cet Etat laïciste et cathophobe s'immiscer dans NOS affaires si profondément est la pire des choses à faire.
Lahire]
Rédigé par : Claude | 18 février 2011 à 08:56
Malheureusement aujourd'hui, où là majorité des français n'est plus catholique fervente; il parait difficile d'affirmer une religion d'état, en tolérant/confinant les autres religions, sans compromettre la paix civile... il est trop tard...
Cette idée d'un pasteur étasunien, (je crois), est une bonne idée : il faut juger le Coran ! Et s'il est coupable, interdire ce livre !
Il ne faut pas interdire d'être musulman et de pratiquer cette religion,
mais DANS LE BUT de MAINTENIR LA PAIX, il est encore possible d'interdire au maximum tout ce qui est contraire à:
- notre droit français et européen (le halal...),
- à nos valeurs et nos racines européennes chrétiennes affirmés par Sarko, Waulquiez... (racisme, polygamie, mauvais traitement des femmes, appel à la violence, charia...),
- à notre culture, notre architecture (burka, ijab, minaret...),
...
Nous sommes obligés, ils sont en guerre contre l'Occident, il n'y a qu'à voir leurs discours, quand ils sont "chez eux", c'est très clair...
Rédigé par : Thib | 18 février 2011 à 09:49
on est en Soviétie
Rédigé par : c | 18 février 2011 à 11:12