A la rentrée dans les écoles : morale ou... (2)
31 août 2011
... laïcisme forcené?
Si l'école était réellement complémentaire de la famille dans une oeuvre commune d'éducation dans laquelle la famille serait première et décisionnaire comme le souhaite l'Eglise, la question de l'enseignement de la morale à l'école ne se poserait pas.
Si les enseignants se trouvaient encore dans l'esprit décrit par Jules Ferry lui-même qui leur écrivait ces lignes, ancré qu'il était encore dans un bon sens évident et sur des bases culturelles chrétiennes fortes, on aurait encore des bases de discussion :
"Vous êtes l'auxiliaire et, à certains égards, le suppléant du père de famille ; parlez donc à son enfant comme vous voudriez que l'on parlât au vôtre ; avec force et autorité, toutes les fois qu'il s'agit d'une vérité incontestée, d'un précepte de la morale commune ; avec la plus grande réserve, dès que vous risquez d'effleurer un sentiment religieux dont vous n'êtes pas juge.
Si parfois vous étiez embarrassé pour savoir jusqu'où il vous est permis d'aller dans votre enseignement moral, voici une règle pratique à laquelle vous pourrez vous tenir : avant de proposer à vos élèves un précepte, une maxime quelconque, demandez-vous s'il se trouve, à votre connaissance, un seul honnête homme qui puisse être froissé de ce que vous allez dire. Demandez-vous si un père de famille, je dis un seul, présent à votre classe et vous écoutant, pourrait de bonne foi refuser son assentiment à ce qu'il vous entendrait dire. Si oui, abstenez-vous de le dire ; sinon, parlez hardiment, car ce que vous allez communiquer à l'enfant, ce n'est pas votre propre sagesse, c'est la sagesse du genre humain, c'est une de ces idées d'ordre universel que plusieurs siècles de civilisation ont fait entrer dans le patrimoine de l'humanité. Si étroit que vous semble, peut-être, un cercle d'action ainsi tracé, faites-vous un devoir d'honneur de n'en jamais sortir, restez en deçà de cette limite plutôt que de vous exposer à la franchir : vous ne toucherez jamais avec trop de scrupule à cette chose délicate et sacrée, qui est la conscience de l'enfant.
Mais une fois que vous vous êtes ainsi loyalement enfermé dans l'humble et sûre région de la morale usuelle, que vous demande-t-on ? Des discours ? Des dissertations savantes ? De brillants exposés, un docte enseignement ? Non, la famille et la société vous demandent de les aider à bien élever leurs enfants, à en faire des honnêtes gens. C'est dire qu'elles attendent de vous non des paroles, mais des actes, non pas un enseignement de plus à inscrire au programme, mais un service tout pratique que vous pourrez rendre au pays plutôt encore comme homme que comme professeur".
Mais ne rêvons pas d'un âge d'or qui n'en fut peut-être pas un et qui annonçait les miasmes du système éducatif d'aujourd'hui. En effet, l'enseignement de la morale en France est né de la décision de la République de dissocier la Foi et la Religion de la vie de la cité, de la chose publique :
"La loi du 28 mars se caractérise par deux dispositions qui se complètent sans se contredire : d'une part, elle met en dehors du programme obligatoire l'enseignement de tout dogme particulier, d'autre part elle y place au premier rang l'enseignement moral et civique. L'instruction religieuse appartient aux familles et à l'église, l'instruction morale à l'école.
Le législateur n'a donc pas entendu faire une œuvre purement négative. Sans doute il a eu pour premier objet de séparer l'école de l'église, d'assurer la liberté de conscience et des maîtres et des élèves, de distinguer enfin deux domaines trop longtemps confondus, celui des croyances qui sont personnelles, libres et variables, et celui des connaissances qui sont communes et indispensables à tous. Mais il y a autre chose dans la loi du 28 mars : elle affirme la volonté de fonder chez nous une éducation nationale et de la fonder sur des notions du devoir et du droit que le législateur n'hésite pas à inscrire au nombre des premières vérités que nul ne peut ignorer.
Pour cette partie capitale de l'éducation, c'est sur vous, Monsieur, que les pouvoirs publics ont compté. En vous dispensant de l'enseignement religieux, on n'a pas songé à vous décharger de l'enseignement moral : c'eût été vous enlever ce qui fait la dignité de votre profession. Au contraire, il a paru tout naturel que l'instituteur, en même temps qu'il apprend aux enfants à lire et à écrire, leur enseigne aussi ces règles élémentaires de la vie morale qui ne sont pas moins universellement acceptées que celles du langage et du calcul" (circulaire concernant l'enseignement moral et civique de Jules Ferry, 17 novembre 1883).
L'enseignement de la morale dans les écoles de France est bien dès sa genèse, le fruit d'une volonté d'un monde sans Dieu. Benoît XVI, dans son intention de prière, souhaite un retour à cette unité éducative détruite par les enfants de la Révolution française, aveuglés par une vision maçonnique de l'homme ("Il est vieux comme le diable leur monde qu'ils disent nouveau et qu'ils veulent fonder dans l'absence de Dieu") :
"transmettre l'amour de la vérité et éduquer aux valeurs morales et spirituelles authentique" (Benoît XVI, intention de prière de septembre).
L'école de 2011 en France est désormais très loin des bases qui permettraient un enseignement sain de la morale et des objectifs de l'enseignement rappelés aujourd'hui par le Saint Père et la Curie.