Rapprochement entre l'Eglise copte orthodoxe et l'Eglise catholique ?
22 mai 2013
Sa Sainteté le Pape François et le Patriarche copte orthodoxe Tawadros II se sont récemment rencontrés à Rome. Pour Mgr Anba Kyrillos William Samaan, évêque copte-catholique d’Assioutait, c'est un tournant œcuménique entre les deux Églises :
"Oui, on pourrait vraiment l’appeler ainsi. Le Pape Tawadros a montré dès le début qu’il souhaitait se rapprocher des autres Églises. Peu après l’élection du pape François, il a insisté pour le rencontrer le 10 mai, la date du 40ème anniversaire de la rencontre entre le Pape Paul VI et le patriarche Chenouda III. Certes, il n’est pas très facile d’obtenir rapidement une audience au Vatican. Mais on s’y est efforcé d’accéder au souhait de Tawadros. Je suis donc vraiment persuadé qu’il s’agit d’un tournant. En ce qui concerne l’œcuménisme, Tawadros est tellement différent de son prédécesseur Chenouda.
Dans quelle mesure ?
D’un côté, le patriarche copte Chenouda avait voulu rendre visite en 1973 au Pape Paul VI au Vatican. Mais de l’autre, il a rapidement pris peur que l’œcuménisme puisse troubler les fidèles et qu’ils n’accorderaient plus de valeur à leur appartenance confessionnelle. C’est pourquoi il ne voulait entretenir aucune relation avec l’Église catholique locale. La question de la reconnaissance du baptême catholique pesait particulièrement sur les relations entre les deux Églises en Égypte. Des catholiques se convertissant par exemple à l’Église copte pour pouvoir se marier doivent être rebaptisés.
Vous attendez-vous ici à ce que les choses évoluent ?
Oui. Le Pape Tawadros lui-même l’a dit. Le Pape Chenouda avait exigé un rebaptême parce que selon lui, l’unité dans la foi était une condition indispensable pour la reconnaissance du baptême catholique. Il se référait ici à l’épître aux Éphésiens, où il est question d’un seul Seigneur, d’une seule foi, d’un seul baptême. La difficulté proviendra du fait que le synode copte est toujours composé de nombreux partisans de Chenouda. Mais il y a aussi des évêques qui ne suivaient que par pure obéissance et non par conviction la ligne de Chenouda en ce qui a trait au rebaptême. Je ne peux donc pas pronostiquer s’il y aura un changement de la ligne de conduite. Mais j’ai le sentiment que la cordialité du Pape et l’ouverture d’esprit des représentants de la Curie ont positivement impressionné Tawadros et ses compagnons, dont aussi des élèves de Chenouda.
Pourrait-on dire que les problèmes que les chrétiens rencontrent actuellement en Égypte ont engendré un rapprochement œcuménique ?
Oui, très certainement. Lorsque la révolution s’est déclenchée il y a deux ans, il y a eu des consultations spontanées entre nous autres catholiques, les orthodoxes et les protestants. Nous voulions nous exprimer d’une seule voix. Sur le plan institutionnel, ce rapprochement s’est traduit dans le Conseil des Églises d’Égypte.
Pensez-vous que le rapprochement œcuménique butera au plus tard sur la question relative à la primauté du Pape ?
Non, je ne pense pas. La question de la primauté du Pape a été discutée dans les débats théologiques menés entre catholiques et membres des antiques Églises orientales. Ce qui est déterminant, c’est la pratique reconnue au cours du premier millénaire, avant le schisme entre les Églises d’Orient et d’Occident. Dans sa lettre encyclique Ut unum sint de 1995, Bienheureux Jean-Paul II avait invité les patriarches orientaux à réfléchir quel pourrait être un accomplissement du ministère pétrinien qui leur semblerait acceptable.
À l’échelle internationale, l’Église catholique et le Pape sont considérés comme instance morale. Est-ce attrayant pour une Église nationale telle que l’Église copte-orthodoxe ?
Oui, ça l’est aussi. Une Église mondiale comme l’Église catholique a évidement d’autres moyens qu’une Église uniquement nationale pour attirer l’attention sur les problèmes survenant dans un pays. L’Église copte est encouragée par la manière dont l’Église catholique s’engage en sa faveur. C’est ressorti nettement lors de la visite de Tawadros."