Question immorale : "les parents sont-ils ou non les premiers éducateurs des enfants ?"
05 juin 2013
Extraits du débat hier à l'Assemblée nationale autour de l'amendement sur l'enseignement de la théorie du genre à l'école :
"M. Xavier Breton. Nous abordons l’article 31 qui est devenu, en quelques semaines, l’un des articles vedettes de ce projet de loi, malgré les positions du Gouvernement et de la majorité. Pourquoi ? Parce que cet article 31 indique les objectifs de la formation primaire. Un amendement adopté en commission des affaires culturelles a provoqué de vives réactions. Cet amendement vise à dire que la formation primaire assure les conditions d’une éducation à l’égalité de genre.
Il y a eu beaucoup de réactions, dont une pétition en ligne qui a recueilli 270 000 signatures et qui s’est appuyée notamment sur les propos de notre collègue Mme Sommaruga. Je la cite, si elle le permet. En commission, elle indiquait : « Avec cet amendement, il s’agit de substituer à des catégories telles que le sexe ou la différence sexuelle, qui renvoient à la biologie, le concept de genre, qui montre que les différences entre les hommes et les femmes ne sont pas fondées sur la nature, mais sont historiquement construites et socialement reproduites. » [...]
Il y a eu un recul au Sénat, puisque nous ne parlons plus de cette notion de genre, mais d’égalité entre les hommes et les femmes. C’est un recul appréciable au plan sémantique. [...] Il y a eu un recul sémantique mais aussi politique : à la lumière des débats, la majorité, sentant la pression monter dans l’opinion, a opéré un recul sur cette notion de genre et nous nous en félicitons. [...]
Mme Barbara Pompili. Nous arrivons à ce fameux amendement n° 180, qui a fait couler déjà beaucoup d’encre.
Je tiens en préambule à signaler qu’en démocratie, on doit pouvoir débattre de tout [sic ! Y compris de l'avortement ? NDMJ] et utiliser tous les arguments possibles. [...] Je suis évidemment parfaitement consciente qu’il y a une différence entre les sexes, et j’en suis d’ailleurs très heureuse. Je parle simplement du genre, qui est un concept utilisé pour désigner les différences non biologiques entre les hommes et les femmes, et, notamment, le comportement attendu en fonction d’un sexe dans une société donnée, qui est défini par la société de manière hétéronome sans être aucunement lié à l’inné ou à ce qui est issu de la nature. On voit donc bien que c’est totalement différent.
On devrait pouvoir s’interroger sur le fait que les enfants sont programmés très tôt pour être différents parce qu’ils sont nés filles ou garçons. Les enfants doivent pouvoir évoquer au sein de l’école ces stéréotypes selon lesquels, par exemple, une fille doit être meilleure en français qu’en maths. C’est inscrit très profondément dans notre culture et les enfants doivent pouvoir s’interroger là-dessus. L’objectif de cet amendement, c’est de demander à tous d’avoir une réflexion et pas du tout d’entrer dans des théories fumeuses. [...]
M. Yves Durand, rapporteur. [...] J’aimerais donc vous convaincre, madame Pompili de retirer votre amendement, avec la même exigence de vérité et de respect des consciences qui est la mienne. S’il n’est pas retiré, j’y serai défavorable. [...]
M. Vincent Peillon, ministre. [...] Nous restons sur la position du Sénat, mais c’est la mission de l’éducation nationale de lutter, dans l’intérêt même de notre pays, contre un certain nombre de stéréotypes, y compris de genre au sens fille-garçon, qui font par exemple que notre pays a des résultats excellents pour les filles en terminale et au baccalauréat scientifiques, et en même temps un déficit en femmes ingénieurs considérable par rapport à nos voisins européens. [...] Nous avons la responsabilité, dans les orientations, dans le travail scolaire, de lutter très activement pour l’égalité entre les filles et les garçons. Ce sera l’une des actions de ce ministère ; elle est engagée et sera conduite avec résolution. [...]
Par ailleurs, Xavier Breton a soutenu un autre amendement sur la place des parents dans léducation de leurs enfants :
M. Xavier Breton. Cet amendement vise à préciser que la formation primaire « accompagne les familles » plutôt que d’inscrire dans le texte qu’elle s’effectue « conjointement avec la famille ». En effet, ce serait placer la famille au même niveau que l’école alors que je considère que les parents sont les premiers éducateurs des enfants. L’école accompagne simplement les familles. Je sais que la majorité ne partage pas cette opinion et qu’elle n’a pas voté cet amendement en commission. [...]
M. Yves Durand,rapporteur. Avis défavorable à un amendement qui n’a pas été défendu. [...]M. Vincent Peillon, ministre. Les rapports avec les familles sont précisément au cœur de la refondation de l’école avec l’idée, d’ailleurs enrichie par les parlementaires de la majorité, de coéducation, c’est-à-dire la possibilité de mieux associer les parents au travail de l’école. Il n’est pas question de prééminence mais de l’ouverture de l’école aux parents. On l’a vu concernant les langues et sur un certain nombre d’autres sujets, le Sénat ayant encore enrichi le texte en prévoyant des espaces pour les parents dans les institutions scolaires : nous avons besoin d’accompagner les parents les plus éloignés de l’école pour assurer, comme le montrent les études, la réussite des élèves. Leur réussite devrait être le point de vue autour duquel devrait revenir le débat. Je déplore à cet instant que M. Breton se serve d’un débat sur l’école qui concerne douze millions d’enfants pour régler des comptes avec une loi déjà votée par la République. [...]
M. Xavier Breton. Monsieur le ministre, selon vous, les parents sont-ils ou non les premiers éducateurs des enfants ? Pour nous, c’est oui. On attend votre réponse. Elle est importante de la part d’un ministre de l’éducation nationale.
Plusieurs députés du groupe SRC. C’est une question immorale !"