Est-il possible de modifier le langage de l’Eglise sur la famille ?
20 octobre 2014
Norberto González Gaitano, professeur à l’Université pontificale de la Sainte-Croix et coordinateur du groupe de recherche international Family and Media, répond à Famille chrétienne. Extrait :
"Au cours du Synode sur la famille, il a été plusieurs fois question d’adapter le langage de l’Eglise afin que sa doctrine sur la famille, le couple et la sexualité soit mieux comprise. La manière dont l’Eglise s’exprime est-elle un frein à l’acceptation de son enseignement ?
Il faut distinguer les textes du Magistère, ceux de la prédication et les témoignages. Les textes du Magistère sont très beaux et très vrais, pensons à Gaudium et spes, Familiaris consortio ou encore à l’encyclique Caritas in veritate. Mais personnellement, je ne connais personne qui ce soit converti par les textes du Magistère, à la différence de la Bible. Le problème se trouve au niveau du langage de la prédication et du témoignage. [...]
Certains participants au Synode ont émis le souhait de modifier des expressions comme « intrinsèquement désordonnés » ou « péché grave ». Si l’Eglise changeait certaines formulations, son message passerait-il mieux ?
On parle trop du langage. Le problème ne vient pas du langage, mais de la compréhension de la substance des choses. La vérité ne se réduit pas à des formules, mais elle est contenue dans les formules. Si je possède la vérité que quelques formules renferment, je possède la vérité et non ces formules. Mais si la personne n’est pas possédée par la vérité vers laquelle pointent les formules, elle ne sera pas en mesure de l’exprimer avec ses propres paroles. Elle risque alors de répéter des slogans, des stéréotypes, une doctrine morte. Il faut s’approprier la vérité recueillie dans les formules pour en témoigner. [...]
Est-il possible de modifier le langage de l’Eglise sur la famille sans diminuer la portée/la force de son enseignement ? Ne risque-t-on pas de tomber dans un certain relativisme ?
C’est un risque, parce qu’aujourd’hui les paroles ne signifient pas la réalité pour beaucoup de personnes. Or, les paroles ont des conséquences. Si les paroles ne signifient rien, elles n’ont pas de conséquences. Par exemple, quand je dis « je promets », je ne dis pas seulement une chose, mais je fais une chose. Quand les paroles se réfèrent à une action humaine, elles permettent de régler les relations humaines. [...]"
Et le commentaire sous cet entretien est intéressant :
""je ne connais personne qui se soit converti par les textes du Magistère"... Moi, si, j'en connais au moins une : moi-même, vers l'âge de 20 ans, en lisant "Evangelium Vitae", j'ai été ébloui par la 'splendeur de la vérité', par la géniale cohérence de la foi de l'Église. "Fides ex auditu", dit saint Paul : la foi naît de l'écoute de la Parole de Dieu... et de celle des apôtres qui la relaient et la déploient pour nous."