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La nécessité d'une politique française indépendante en Europe de l'Est

Poutine et le volet spirituel de la politique russe

Philippe Grasset nous expose une réflexion nuancée à ce sujet. Son article est long, comme souvent, vous pouvez le retrouver ici dans son intégralité. Nous vous proposons ci-dessous l'extrait selon nous le plus intéressant.

"Poutine a-t-il une “vision” ? Peut-être le mot prête-t-il trop à confusion avec le sens très fort donné à son concept opérationnel de “visionnaire”. Il est encore trop tôt pour dire si Poutine a une “vision” dans le sens d’être un “visionnaire”, et il s’agit très certainement d’être circonspect à cet égard parce que certains traits de son caractère rendent imprudent sinon discutable un tel verdict. Il s’agit donc de préciser son attitude d’une façon concrète, ce qui peut être fait en utilisant les concepts nécessairement différents de “culture” (“culture russe”, culture nationale) et de religion.

Certainement, Poutine a une conscience de l’usage nécessaire qui peut et doit être fait de la dimension spirituelle, essentiellement pour le cas russe au travers de la religion chrétienne orthodoxe dont la marque nationale russe est très grande. Cette dimension spirituelle a en réalité plus une dimension culturelle qu’une dimension religieuse, et même essentiellement une dimension culturelle et accessoirement une dimension religieuse... C’est ce qu’exprime précisément Iben Thranholm lorsqu’elle écrit : “En appelant à la restauration de ces édifices chrétiens, Poutine répudie l’héritage soviétique avec son idéologie athée et sa charge anti-chrétienne, et il réaffirme que la religion orthodoxe est au cœur de la culture russe. Ce sont ses propres mots : ‘Voici l’idée ... restaurer l’apparence historique du lieu avec deux monastères et une église, mais en leur donnant, en fonction des réalités du présent, un caractère exclusivement culturel.’” («By calling for the restoration of these Christian buildings Putin repudiates the Soviet legacy with its atheist ideology and its record of anti-Christianity and reaffirms Orthodoxy as the heart of Russian culture. In his own words : “Here is the idea ... to restore the historic appearance of the place with two monasteries and a church, but giving them, considering today’s realities, an exclusively cultural character.”»)

En d’autres termes, un Russe peut être et doit être culturellement marqué par la religion orthodoxe, et même il doit l’accepter et même le vouloir toujours dans le sens culturel, sans pour autant être un croyant, et encore moins un pratiquant dans le cadre formel de la religion orthodoxe. (Il peut effectivement “avoir la foi”, – c’est une affaire personnelle sinon intime, – en-dehors de la religion orthodoxe.) Ce qui est exigé de lui pour être un Russe, c’est d’accepter la présence centrale de la religion orthodoxe dans la définition et la manifestation de la culture nationale russe, – et là se trouve effectivement la dimension culturelle à laquelle il doit souscrire. En d’autres mots et pour en venir aux circonstances, la religion orthodoxe est un outil pour Poutine, nullement un but ni un guide. (Ce constat est proposé sans se préoccuper de savoir ce qu’est la conviction personnelle de Poutine, – avoir la foi ou pas, la pratiquer ou pas au sein de l’église orthodoxe, etc., – là aussi “affaire personnelle sinon intime”, qui est une question secondaire pour notre propos. Le constat vaut, quelle que soit l’attitude de Poutine vis-à-vis de l’église orthodoxe, cela se rapportant alors à la fonction et non à l’individu, à “Poutine-en-tant-que-Président”.)

On comprend évidemment qu’il s’agit d’un comportement, d’une “politique” en rupture complète avec le courant dominant de l’époque que nous vivons, sinon en opposition complète à lui. Selon notre classification, c’est fondamentalement de ce point de vue que Poutine est antiSystème, sans nécessairement le vouloir ni le rechercher mais par sa nature même. Le nœud de la question n’est ni la religion, ni la foi, mais bien l’affirmation culturelle identitaire qui se réalise grâce à la référence religieuse ; cette affirmation identitaire renvoie par définition à une conception principielle parce que l’identité est un principe qui distingue une unité, renvoyant à la conception originelle de l’unité. Cette conception principielle a évidemment une vocation universelle (sa référence à l’unité, l’unique) mais cette universalité ne peut être conçue qu’au travers d’une structuration puissante, une forme achevée : lorsque toutes les identités différentes sont affirmées et achevées, elles se trouvent réunies par leurs différences elles-mêmes dans la forme structurée voulue par le Principe. C’est le contraire de l’universalité prôné par le Système qui est nécessairement déstructurée, dissoute jusqu’à l’entropisation, – c’est-à-dire nécessairement complètement informe.

(Dans ce cas, la globalisation, qui est dans le sens courant l’opérationnalisation essentiellement économique d’une universalité débarrassée de la forme puissante, est exactement le double inverti, faussaire sinon satanique, de l’universalité. Elle détruit tous ses composants en niant leurs identités, pour les fondre en un magma informe, une entropisation achevée comme double effectivement satanique de l’universalité principielle.)

A ce point, l’on comprend que nous perdions de vue Poutine, en écartant le débat sempiternel de l’“homme providentiel” : la providence est quelque chose qui n’a nul besoin de l’homme pour se manifester, si même elle en fait parfois usage selon sa convenance et les opportunités. Le fait qui importe est que les conditions historiques bien connues (l’histoire terrible de la Russie au XXème siècle notamment), haussées au niveau métahistorique, font de la Russie, et de son président par conséquent dans ce Moment précis de l’histoire que nous jugerons être métahistorique au cœur de la crise d’effondrement de notre civilisation (identifiée comme “contre-civilisation”), un facteur essentiel de l’immense lutte en cours ; et un facteur nécessairement, naturellement antiSystème.

Il s’agit d’une situation et non d’une dynamique. (La seule dynamique qui importe est celle du Système, dont la surpuissance fait naître des incidences antiSystème dont les effets indirects alimentent la transformation de cette surpuissance en autodestruction.) Cette situation donne à la Russie le rôle qu’elle joue pour l’instant, et à son président le rôle d'adaptateur et d’opérateur de ce rôle. Ainsi s’explique aisément la “haine anti-Poutine” qui est absolument une “haine-Système”, totalitaire, exprimée selon un réflexe pavlovien qui n’a nul besoin d’explication ni de justification, qui fabrique naturellement et sans aucune conscience tous les artifices (les fameuses narrative) pour rassurer la raison chaotique de ceux qui l’expriment sans savoir ce qu’ils font. (On pardonnera aisément, tout en les combattant impitoyablement, à ceux-là qui véhiculent la “haine-Système” puisque, selon la parole fameuse descendue au ras des pâquerettes sinon dans les ténèbres de cette agitation-Système, “ils ne savent pas ce qu’ils font”.)

Le brio de Poutine est certainement d’avoir compris, au travers de l’importance écrasante prise par la communication dans notre temps, l’importance non moins écrasante de ce qu’on désignerait comme “le fait culturel”, – c’est-à-dire, selon l'interprétation métahistorique du temps courant, la nécessaire structuration identitaire. Nous avancerions l’hypothèse qu’il en a pris conscience précisément et opérationnellement avec les événements décrits ci-dessus (2011-2012), où effectivement il s’est avéré que la communication était l’arme principale de destruction des entités principielles et antiSystème, autant qu’elle pouvait être le moyen principal de mobilisation et de constitution de l’antiSystème. Bien entendu, la force, la puissance de la structuration identitaire dans le cas russe, est qu’elle s’appuie sur ce que l’“âme russe” identifie aisément comme une transcendance authentifiée pour elle par des événements historiques, – et dont l’église orthodoxe est au moins le témoin essentiel, sinon un des acteurs essentiels, – d’où le rôle culturel que doit jouer cette religion puisque l’identité se manifeste par la culture nationale dans ce cas. (On conviendra que ce schéma est assez classique, c’est-à-dire assez simple comme toutes les grandes choses. Il pourrait se manifester dans d’autres cas selon leurs fortunes, – la France est bien entendu le premier exemple venu à l’esprit, pour l’instant empêchée par une infortune absolument sans précédent dans son histoire.)

... On doit insister sur ce fait qu’il ne s’agit en aucun cas de ce qu’on pourrait nommer une “spiritualisation de la politique” mais bien de l’ajout de la dimension spirituelle dans la politique pour la modifier sans lui ôter sa substance de politique ; la politique russe ne devient pas une politique chrétienne-orthodoxe, comme il existe des politiques islamistes extrêmes, voire chrétiennes-extrêmes dans le chef de certains courants évangélistes. La démonstration de cette observation se trouve dans l’extrême réalisme, la prudence de tous les instants de la politique russe, notamment dans le domaine des affaires extérieures et de sécurité nationale, et cela malgré les tensions et les provocations. (Une “spiritualisation de la politique” serait une politique selon les conceptions du philosophe Douguine, par exemple. Douguine a désapprouvé la politique ukrainienne de Poutine parce que le président russe a écarté l’option de l’intervention en Ukraine, au côté des milices du Donbas. Cette politique répondrait évidemment à l’argument impératif du lien “spirituel” unissant les Russes et les Ukrainiens de cette région, eux-mêmes directement de filiation russe.) Reste à voir si, à un moment où les événements suscitent des pressions catastrophiques, il ne faudra pas hausser cette politique à hauteur des enjeux eschatologiques de la situation générale ; reste à voir si Poutine saura le comprendre, ou plutôt le sentir, et accepter l’enjeu de ce Moment-là... C’est sans aucun doute à ce point de rupture que ce situe la mesure de son véritable rôle historique."

Commentaires

Viguié Gérard

bravo pour cet article essentiel ; avant sa mort l'écrivain franco russe Wladimir Wolkoff pressentait cette "résurrection" chez Poutine, le seul dirigeant important sur la planète aujourd'hui à comprendre le rôle clef historique du culturel et de la spiritualité ... qu'i le veuille ou non, il est désormais porté par une vague et porteur d'une espérance, laquelle percute précisément la prophétie de Fatima...
Finalement nous n'avons rien à perdre à la croire,car souvent l'histoire démontre le caractère dialectique de tels mouvements.

senex

L'église orthodoxe"Un outil pour Poutine" très juste. Ne pas trop se faire d'illusions. "Il y aura de faux sauveurs...."

Alexandre de La cerda

Wladimir Poutine est certainement croyant - il se trouve que j'ai rencontré, il y a une douzaine d'années, le prêtre (issu de l'émigration "blanche" mais retourné en Russie) qui l'a confessé à plusieurs reprises lors des visites privées du chef de l'Etat russe dans un monastère du Nord - sans trahir évidemment le secret de la confession, on peut être assuré de la solidité de la Foi de Poutine...

perchè_no

à (re)lire :
http://www.riposte-catholique.fr/riposte-catholique-blog/poutine-et-la-defense-des-valeurs-chretiennes

Paul L

Pure propagande.

Poutine est un pur produit du KGB et se moque totalement de la religion.

Il se sert de l'église orthodoxe car il y est contraint, son gouvernement néo-soviétique n'étant pas (encore?) assez puissant pour remplacer toutes les images du Christ par des photos de Poutine, comme c'était le cas avec Staline...

Dachs

Les Russes - en réalité tous les Slaves - ont la chance d'avoir une véritable religion nationale. Cette religion est vitale pour l'âme du peuple, en ce qu'elle est un fondement de sa cohésion, indépendamment de son caractère "vrai" ou "erroné". La liturgie, par laquelle le peuple s'adresse à son Créateur, est indissociable de la culture de ce peuple. Les pères conciliaires de Vatican II ont certainement eu une intuition de cela en favorisant l'inculturation de la liturgie romaine au sein de différents espaces culturels. Malheureusement, le résultat a été au-delà de tous nos cauchemars, puisque les peuples récemment christianisés n'ont pas forcément tirer les bénéfices de cette "ouverture", tandis que nous, vieux Européens du Nord-Ouest, nous étions dépouillés de notre liturgie vénérable.

Colargol

Que fait Poutine pour les chrétiens du Moyen-Orient ? Je n'arrive pas à comprendre pourquoi l'armée russe reste l'arme au pied alors que des chrétiens se font massacrer et appelent au secours.
Qu'on ne me dise pas que la Russie n'a pas les moyens de faire plus que l'Australie, les Pays-Bas...ou la france.

Ursule

Poutine fit un étonnant discours le 19 septembre 2013 :
https://www.youtube.com/watch?v=VEy1k79-FWo

Il faut savoir qu'il fut baptisé :
https://www.youtube.com/watch?v=u3d_yxJhmjk

Et qu'il a remis en place ceux qui s'étaient emparé de toutes les richesses de la Russie pour une bouchée de pain? Notamment un qui voulait vendre le pétrole russe aux USA !
http://www.youtube.com/watch?v=Q2Cl8lSv9Is

perchè_no

@Ursule

et il a une manière bien à lui de remettre les milliardaires à l'ordre (avec un humour et un sens de l'économie - voir dernières secondes de la vidéo - que ne peuvent être que ceux d'un homme sérieux)
http://www.youtube.com/watch?v=80c2rR25f6w

Dominique

Poutine fait régulièrement une retraite spirituelle dans un monastère du Nord de la Russie. Poutine est un chrétien très croyant.

irène

L'Occident n'arrête pas de faire des procès d'intentions à Vladimir Poutine.
Oui, c'est connu il se confesse auprès d'un moine orthodoxe et quand on connait un peu les orthodoxes (russes) on sait que ce n'est pas Poutine qui dirige l'Orthodoxie russe mais plutôt l'Orthodoxie russe qui dirige Poutine, en tout cas en ce qui concerne l'identité russe !
Poutine essaie de protéger son pays et son peuple d'abord, et alors ? Quel est l'homme / la femme politique en Occident dont on pourrait sincèrement dire la même chose. Quel homme d'Etat français se confesse aujourd'hui ?
Cela fait de Vladimir Poutine certainement pas un saint, quoique qui sait en dehors de Dieu Lui-même qui scrute les cœurs ...
Quel rôle abjecte nous - Occident - avons joué en Ukraine contre l'église orthodoxe.
Arrêtons-nous d'être hypocrites, le but affiché est non seulement d'abattre la Russie mais également de soumettre l'orthodoxie russe sous couvert d'œcuménisme ! A ne jamais oublié : à l'origine l'Eglise était catholique ET orthodoxe et le grand schisme était (et continue à l'être) un scandale.

Papon

Il a fait baptiser en secret ses deux filles des prenoms les plus admirés en Russie: Marie et Catherine.

Eloi

"En d’autres mots et pour en venir aux circonstances, la religion orthodoxe est un outil pour Poutine, nullement un but ni un guide."

C'est faux. Poutine est -au moins à titre privé- un orthodoxe pratiquant. Il se rend d'ailleurs régulièrement au monastère de Valaam, au bord du lac Ladoga, pour consulter un starets.

Cela ne l'empêche pas, néanmoins, de comprendre que tous les Russes ne sont pas dans son cas, et que l'aspect culturel de l'Orthodoxie peut chez certains d'entre eux primer sur la conviction religieuse.

Sinon, bon article.

DUPORT

Lorsque l'on voit la racaille peuplant le gouvernement français, les ministères, l'Assemblée, le Sénat, les partis et toutes les institutions de la France ont peut affirmer sans se tromper :
QU'AUCUN FRANÇAIS N'EST APTE A JUGER POUTINE, LA RUSSIE, NI MÊME LA CORÉE DU NORD !!

Regardez moins la paille des autres et un peu plus la gigantesque forêt de poutres française !

Michèle

Ça c'est bien vrai DUPORT!!!
Comment pourrions-nous distinguer quoi que ce soit à travers la montagne d'ordures qui recouvre notre pauvre pays?!
On peut penser ce que l'on veut de Vladimir Poutine, mais en parler avec autant d'arrogance, d'impudence, de suffisance...quand il y aurait lieu de faire profil bas..
S'il est vrai qu'on a les chefs qu'on mérite..on devrait avoir le bon goût de se taire.

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