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Les chrétiens en Corée du Nord

Suite à la  rencontre d’avril entre les chefs d’État des deux Corées, puis celle de juin entre Donald Trump et Kim Jong-un, son homologue nord-coréen, l’AED a interrogé le Père Kang Ju-Seok, directeur de l’Institut nord-asiatique catholique pour la paix et la coopération pour en savoir plus sur la situation des Nord-Coréens. Extraits :

Pere-Kang-Ju-Seok"La Corée du Nord est souvent considérée seulement comme un facteur d’insécurité et vue sous l’angle d’un pays dirigé par un dictateur aux commandes de missiles. Nous oublions toutefois les vies des 24 millions de personnes normales qui peuplent ce pays. En effet, nous n’en savons que très peu sur eux. Néanmoins, grâce aux témoignages de réfugiés nord-coréens, nous savons que la population n’est pas en mesure de venir à bout des défis quotidiens dans le cadre d’une économie d’État socialiste. Il y a notamment un manque de nourriture de sorte que la population a dû prendre l’initiative de faire entrer clandestinement des marchandises en provenance de la Chine. De nombreux réfugiés racontent que de plus en plus d’informations arrivent de l’étranger et que des médias étrangers parviennent aussi à s’infiltrer dans le pays. De plus en plus de Nord-Coréens ont accès à des téléphones portables, des lecteurs de DVD et des ordinateurs. Ils sont aussi de plus en plus nombreux à regarder en cachette des films sud-coréens ou même des films hollywoodiens.

Vous parlez du manque de nourriture ?

Beaucoup de gens sont morts de faim dans les années 1990. Bien que nous ne connaissions pas les chiffres exacts, on estime qu’un million de personnes sont mortes à cette époque et à ce jour, les Nord-Coréens souffrent encore d’une pauvreté extrême. Parce que le régime nord-coréen a violé les règles internationales, par exemple en manière d’armement nucléaire, les Nations unies ont très longtemps imposé des sanctions. Je suis préoccupé par ces personnes, en particulier les pauvres et les personnes vulnérables, qui sont celles qui souffrent le plus de ces sanctions.

Peu de gens comprennent la structure politique en Corée du Nord et le culte autour de la dynastie Kim. Pouvez-vous nous fournir des explications ?

Beaucoup d’experts pensent que le pays est une sorte de groupe religieux et que la population voue un culte à la dynastie de la famille Kim. Nous ne savons pas exactement comment fonctionne la société. La peur et la haine envers la Corée du Sud pourraient toutefois jouer un rôle. Deux à trois millions de Nord-Coréens ont perdu la vie durant la guerre de Corée, et le gouvernement nord-coréen continue de profiter de ce traumatisme qui subsiste au sein de la population.

Avant que la dynastie des Kim n’arrive au pouvoir au début du XXe siècle, la capitale nord-coréenne Pyongyang était un centre de la vie chrétienne. On l’appelait même « la Jérusalem de l’Est ». À son apogée, trois habitants de Pyongyang sur dix étaient chrétiens. Plus de deux mille églises ont été construites dans cette région. Qu’est-il arrivé pour que le christianisme ait été décimé aussi rapidement ?

Aux débuts de l’actuel régime politique en Corée du Nord, le gouvernement a estimé que la religion représentait l’ennemi le plus dangereux du régime. C’est pour cette raison qu’il a commencé à persécuter les groupes religieux de diverses manières. Avant même le déclenchement de la guerre de Corée, de nombreux Nord-Coréens, pour la plupart chrétiens, ont franchi la frontière en quête de liberté religieuse. Durant la guerre et après, des millions de personnes ont non seulement été tuées, mais les chrétiens également ont été inlassablement persécutés.

Aujourd’hui, il existe à Pyongyang quatre Églises tolérées par l’État, deux Églises russes orthodoxes, une Église catholique romaine et une Église protestante. Sont-elles là pour apporter la « preuve » que la Corée du Nord tolère la religion ? Où s’agit-il uniquement de pures façades ?

C’est une question très compliquée. Lorsque la cathédrale de Changchung à Pyongyang a été construite en 1988, l’Église catholique en Corée du Nord a fondé l’Association des membres catholiques de Chosun. Ceux-ci ont revendiqué d’être les représentants des catholiques nord-coréens. L’Église en Corée du Sud a commencé à s’engager en faveur d’un échange et du soutien entre les deux Corées.

Depuis vingt ans, des prêtres et des catholiques sud-coréens qui ont eu l’occasion de se rendre en Corée du Nord par diverses voies, ont pu visiter la cathédrale de Changchung et assister à la messe aux côtés de fidèles nord-coréens. Toutefois, en ce qui concerne l’Église nord-coréenne, les prêtres et les catholiques du Sud sont divisés. Certains d’entre eux se montrent impressionnés par la messe à laquelle ils participent avec les Nord-Coréens. D’autres se méfient et se demandent si les Nord-Coréens qui assistent à la messe dans la cathédrale de Changchung sont de vrais fidèles.

À mon avis, la plupart d’entre eux sont convoqués par le régime nord-coréen pour aller dans la cathédrale. Néanmoins, je crois que certains des participants à la messe dans la cathédrale de Changchung sont de véritables fidèles.

En 2001, la Corée du Nord a prétendu que 38 000 fidèles vivaient dans le pays : 10 000 protestants, 3000 catholiques, 10 000 bouddhistes et 15 000 adeptes du cheondoïsme, une religion syncrétique majoritairement basée sur le confucianisme. Y existe-t-il vraiment des chrétiens ? Selon vous, combien sont-ils ?

Malheureusement, nous ne disposons pas de chiffres fiables. Nous pensons toutefois qu’il y a des chrétiens là-bas. [...]"